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Interview des No Money Kids pour leur nouvel album, l’excellent Factory

Le duo d’électro blues No Money Kids revient en ce 26 Novembre 2021 avec Factory, nouvel album qui confirme tout le potentiel artistique de Félix et JM. A cette occasion, Félix nous parle de la conception, de ses inspirations et de ses préoccupations sociales qui d’une certaine manière accompagnent Factory.

Des sons dans les usines

Comment se sent-on quelques jours avant la parution d’un nouvel album? On pose tout le temps cette question à un cinéaste avec son film mais plus rarement à des musiciens. Alors, je vous la pose.

Merci de poser la question, c’est vrai qu’on oublie souvent de la poser aux musiciens. Dans un premier temps, on est très fiers avec JM du travail effectué en studio. On a une hâte qui bouillonne en nous et qui nous pousse à mettre des œillères. En attendant la sortie de l’album pour ensuite en discuter avec tout le monde et récupérer ce que les gens en ont pensé.

Votre nouvel album Factory sort ce 26 Novembre. Ou l’avez vous conçu et quel a été le processus d’enregistrement durant cette période compliquée pour tout le monde? Vous avez pu faire ce que vous vouliez ou c’était plutôt serré en terme de possibilités géographiques?

L’enregistrement de cet album s’est fait au studio des muses chez JM. Nous avons modifié notre fonctionnement habituel puisque nous sommes allés enregistrer des sons dans les usines. Ensuite nous avons utilisé ce matériel parsemé dans chacun de nos titres. On peut reconnaître des bruits de métal, de choc. Tout l’environnement sonore qu’il peut y avoir à l’intérieur des usines. Ensuite, nous avons aussi bousculé la construction intro-couplet-refrain. Dans cet album, quelques morceaux sont très évolutifs. On a gardé le format de chaque chanson qui nous est propre et qu’on adore, mais on a tenu à avoir quelques titres comme Angel Dust qui était là au tout début des enregistrements.

On a pas été particulièrement impacté dans la période du Covid puisque nous étions vraiment à côté et très tôt nous avons eu des dérogations pour travailler. Et puis le travail de studio se fait de manière confinée. Donc, c’est un peu notre quotidien, ça a été Malgré tout quelque chose d’agréable d’avoir le temps de travailler.

 

Habituellement, comment concevez vous vos titres? qu’est ce qui vient en premier? les paroles ou la musique?

Généralement, j’ai toujours une ligne mélodique qui me vient en tête. J’applique des accords de guitare, soit mineurs ou majeurs selon l’approche sombre ou gaie que je recherche. Jouer entre le Mineur, le Majeur, le Majeur #7 qui sont des procédés d’harmonisation. J’ai toujours une phrase et la deuxième phrase est tout de suite impactée par les accords que je trouve. Donc, quand j’arrive à la fin de mon texte et de ma chanson, il y a eu un va et vient  d’inspiration mutuelle entre la guitare et le chant. C’est vraiment un exercice, un duo qui se fait pour la composition.

 

Cet album, vous l’avez composé à quatre mains ou y a t’il des guest qui sont venus prêter leur talent?

pour cet album, nos mains nous ont suffi. Le sujet était tellement personnel et puis les envies que nous avions étaient plutôt dans la recherche de sons. C’était tellement introspectif qu’il était impossible pour nous de le réaliser avec une tierce personne comme on l’a fait sur les premiers albums.

Socles communs

Les gilets jaunes, la pandémie, le climat, beaucoup de sujets de société sont apparus depuis trouble votre précédent album de 2018. est ce que ça a influencé quelques thématiques de votre nouvel album?

Bien évidemment, tous ces mouvements sociaux nous ont marqué. D’ailleurs, je suis moi-même issu d’une famille d’ouvriers. Au départ, les No Money Kids, nous avons cette fonction de témoigner et de vouloir sans cesse relater le quotidien de personnes qui souffrent et qui ne se font pas entendre. Donc, cette situation ne fait que nous conforter dans une volonté de témoignages et de toujours garder en tête qu’il y a toujours un opprimé et un oppresseur. On fait quand même du rock. Donc, on a mis beaucoup de rock, de poésie et de légèreté dans des sujets qui sont déjà très lourds.

D’une manière plus générale, quelle cause vous préoccupe le plus dans notre société actuelle?

Pour ma part, c’est la casse incessante du service public qui est faite par les politiques depuis des années. Et je pense qu’il est réellement urgent de réinvestir des moyens pour pouvoir travailler dignement dans l’éducation, la santé, le droit du travail, la justice etc…
C’est un socle commun qui est important en France aujourd’hui et nous sommes en train de le perdre.

les No Money Kids, c’est Félix à la guitare et au chant et Jean-Marc aux samples, à la basse et à la programmation, 2 manières différentes d’appréhender la musique, donc. Vous réussissez très bien, d’ailleurs, à mêler toutes ces sonorités différentes. Il y a parfois des points de désaccord entre vous. Certainement j’imagine mais à partir de là, y a t’il compromis ou abandon du projet en cours?

Comme tu l’as justement dit, les No Money Kids, c’est deux entités différentes. Mais même si les tâches sont différentes, la décision est la même au final. C’est ce qui fait la magie entre nous depuis des années. Et même si l’on peut avoir de temps en temps des divergences, on a ce socle commun qui nous lie. En studio, on est vraiment plus dans l’expérimentation ensemble. C’est vraiment un travail de duo et je crois que l’amour qu’on a l’un pour l’autre et qui perdure en studio et ailleurs fait qu’on continue à faire des albums. Le jour ou ça changera, on se posera les questions. Mais à ce jour, on regarde toujours dans la même direction artistique.

 

Soleil anglophone

Généralement, quand un artiste prépare un album, plusieurs titres sont laissés de côté pour diverses raisons. Combien de titres avez-vous composé en tout pour n’en garder que treize?

Pour ma part, j’ai bien du composer une cinquantaine de titres. On a fait un écrémage mais on va se laisser le loisir de ressortir ses morceaux qu’on a produit et qui n’apparaissent pas au tracklisting de la galette définitive. C’est un abandon temporaire.

 

Le premier titre, Factory Blues, est plutôt âpre et menaçant avec cette étrange atmosphère. De quoi ça parle?

Ce titre parle clairement de l’aliénation du travail, de l’abandon de soi que l’on fait lorsqu’on appose sa signature sur un contrat de travail qui nous lie à un employeur et qui fait de nous une machine au service du capital. J’ai voulu rendre hommage à toutes ces personnes qui le font encore. Et c’est d’ailleurs un sujet qui ne se limite pas à l’usine mais à tous les secteurs d’activité. J’ai dû faire beaucoup de petits boulots avant d’arriver à ce que je suis. Et j’ai un grand grand respect pour ceux qui le font encore. C’est un peu les questions existentielles que l’on se pose quand on s’arrête deux secondes dans notre vie: quel est le but de notre vie quotidienne?

 

Depuis vos débuts, votre son évolue vers une véritable élasticité entre le blues-rock des Black Keys et la pop des Glass Animals. On ressent cette alchimie notamment sur le titre Shine a Light qui est très efficace. Vos influences ont elles évolué avec le temps et au fil des albums?

Il est vrai que depuis 2015, les influences ont évolué à chaque album. De nouveaux artistes, des nouvelles manière de composer, de produire. Pour Factory, c’était différent. On avait envie d’un album qui soit directement un lien entre le blues, le milieu ouvrier et l’usine au sens large. puisque ce n’est pas uniquement  « le travail du travailleur » qui nous a inspiré. visuellement, toutes les usines qu’on a pu visiter, qu’on a vu en traversant le pays, les images qu’on a pu y voir à l’intérieur, le bruit, l’univers. Tout ce qui peut être poétique est rattaché à ce poumon de notre société moderne. On a effectivement évolué dans nos influences musicales mais l’apport de l’usine au sens large et poétique a finalement été aussi important.

Votre musique hybride colle parfaitement à la langue anglaise. Dans le paysage musical français, est-il facile de se faire une place au soleil quand on chante en anglais?

Disons que le soleil devient de plus en plus anglophone. Cette question revient souvent sur la table. Sur cet album, il y a un titre, Alone qui est à la fois chanté en anglais et en français. Ca n’a pas été quelque chose de réfléchi et voulu. C’est arrivé un peu comme ça. On s’est laissé le loisir de le faire. Mais c’est normal de poser cette question puisqu’on est en France et les gens attachent une part importante à la compréhension du texte. On a cette volonté de chanter en anglais la plupart de nos titres parce que c’est une raison culturelle. J’ai toujours été entouré de musique anglophone et pas du tout de chanson française. Donc, quand je compose, la sonorité de l’anglais s’impose. C’est comme ça dans ma tête et ce sera comme ça dans No Money Kids.

Pour le moment, quelques dates de concert sont prévues. Pour 2022, prévoyez-vous une tournée plus conséquente en France et puis en Europe ou une tournée des festivals en été?

Bien sûr, une tournée est prévue dans toute la France et elle sera bientôt annoncée. Cet album a de toute façon été conçu pour être joué sur scène et on viendra avec plaisir partout pour égrener un peu de Factory dans tout le pays.

 

No Money Kids Factory

Merci à vous, les No Money Kids pour cette riche interview.

Merci à Telma de l’agence Ephelide

Retrouvez la playlist CPR Sound Radio du mois de Novembre 2021

 

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